TUAC trade union advisory committee

 

 

 



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LE COMMERCE ÉLECTRONIQUE
 PROGRÈS ET ENJEUX  NOTE DE SYNTHÈSE

Par Roland Schneider  Conseiller principal en politique, TUAC
Mai 1998

   L'Internet - le pivot du commerce électronique 

Les progrès des télécommunications et de l'informatique ont entraîné une révolution des communications fondée sur le développement rapide de l'Internet. Ce "réseau des réseaux" est en train de connaître une croissance dynamique au niveau de ses applications et un changement important de ses objectifs d'emploi. Plus qu'une source d'information et un moyen de communication, l'Internet devient de plus en plus un moyen de formation et de divertissement mais également un important moyen de commerce électronique. Les entreprises sont de plus en plus nombreuses à utiliser l'Internet pour organiser la conception, la fabrication et la vente de biens et de services. Des entreprises commerciales concernées par l'achat de composants, la logistique, les stocks, la publicité, le marketing et la distribution recourent de plus en plus à l'Internet. 
 

Commerce électronique - l'impact économique 

Certains prévisionnistes estiment que les effets macroéconomiques du commerce par le biais de l'Internet devraient commencer à se faire sentir dans les années à venir. Selon Forester Research, un groupe américain d'experts-conseils, on prévoit que le commerce de détail sur l'Internet passera de 1,8 milliard de dollars l'année dernière à presque 10 milliards de dollars d'ici à 2001. Mais le commerce électronique englobe un éventail plus large d'activités que la vente au détail et notamment toute forme d'opération commerciale effectuée électroniquement c'est-à-dire par l'intermédiaire d'ordinateurs et de réseaux de télécommunications. Le commerce électronique comprend également la commande de biens et de services ainsi que la livraison en ligne de certains services. 

Pour certains économistes, cette révolution numérique rapproche le monde des idéaux de la concurrence parfaite : elle contribue à réduire davantage les coûts de transaction, elle diminue les barrières à l'entrée et devrait améliorer l'accès du consommateur à l'information. Ces économistes prévoient donc que les efforts déployés pour exploiter les avantages économiques potentiellement énormes du commerce électronique vont susciter l'apparition d'entreprises et de marchés novateurs dans des domaines nouveaux et contribueront à la croissance et à la création de nouveaux emplois. Il est clair que les effets universels du commerce électronique sur les entreprises et sur l'ensemble de la société vont entraîner des changements structurels d'une grande ampleur. 
 

Le commerce électronique - marchés et/ou réglementation ? 

Certains gouvernements, des groupes d'entreprises, des instances et des organisations internationales parmi lesquels nous pouvons citer le groupe des sept pays les plus industrialisés (G7), l'OCDE, la Commission européenne et l'OMC, ont pris conscience du potentiel économique du commerce électronique. Ils considèrent que la croissance dynamique de l'Internet apporte la preuve que les entreprises ont réussi à se transformer ce qui entraîne une diminution de leurs charges, un accroissement de leur productivité et de leur compétitivité. Il est de mise à l'heure actuelle de faciliter le commerce électronique par le biais d'une stratégie de non réglementation, favorisant les mécanismes du marché. Ils donnent la priorité à l'autoréglementation de l'industrie et laissent le secteur privé prendre les initiatives en matière de fixation des normes. 

De ce fait, les principaux efforts mis en oeuvre pour construire une Infrastructure mondiale de l'Information et réaliser le plein potentiel du commerce électronique empruntent la voie de la déréglementation, de la libéralisation et de la privatisation. Les gouvernements et les organisations internationales suivent une stratégie minimaliste en matière d'intervention et de participation. Ils essayent de maîtriser les nouveaux problèmes posés par le commerce électronique en ce qui concerne les questions financières et juridiques ainsi que l'accès au marché et la stratégie du "tarif zéro" dans les échanges intervenant sur l'Internet (OMC). Il en va de même pour les travaux en cours à l'OCDE au sujet du commerce électronique. 
 

Les travaux de l'OCDE sur le commerce électronique 

Suite aux contributions et aux débats qui ont eu lieu lors d'une conférence conjointe entreprises/OCDE, en Finlande, en novembre 1997, les travaux de l'OCDE concernant le commerce électronique portent essentiellement sur : 
 
La fiscalité : d'après l'OCDE le cadre fiscal ne devrait pas entraver le développement du commerce électronique mais, en même temps, il devrait faire en sorte que le commerce électronique n'entraîne pas une érosion de la matière imposable ; 

La protection de la vie privée : la recherche de solutions visant à ce que le commerce électronique gagne la confiance du public ; 

Les questions relatives aux consommateurs : le Comité de l'OCDE sur la politique à l'égard des consommateurs s'efforce d'élaborer des lignes directrices pour les transactions commerciales ; 

L'accès aux infrastructures de l'information et leur utilisation : les travaux actuels sont axés sur les problèmes liés à "l'accès universel et peu coûteux aux infrastructures de l'information", la mise en place de cadres appropriés pour l'administration de l'Internet et les mesures permettant la convergence des technologies de l'informatique, des télécommunications et de la radiodiffusion. 
 

Les problèmes liés à la mise en place d'une économie de l'information - le programme d'action syndical 

D'un point de vue syndical, la stratégie de non réglementation, favorable aux mécanismes du marché et destinée à accélérer le passage à une nouvelle économie numérique, soulève un grand nombre de questions. Une stratégie minimaliste au niveau de l'intervention de l'Etat convient-elle pour garantir le cadre juridique indispensable à la protection de la vie privée et à la fiabilité des transactions financières sur l'Internet ? Les prochaines mesures destinées à construire l'Internet, renforcer la croissance du commerce électronique dans les entreprises, développer de nouvelles formes de commande et de distribution numérique de biens et de services (électroniques), mettre au point de nouvelles modalités de vente au détail de biens matériels et de nouvelles formes de transactions entre les entreprises et l'administration ainsi qu'entre les consommateurs et l'administration peuvent-elles en fait s'appuyer suffisamment sur l'autoréglementation de l'industrie ? La suppression des prétendues barrières mondiales ou nationales va-t-elle stimuler le commerce électronique ? Offrira-t-elle, en même temps, de nouveaux débouchés aux petites et moyennes entreprises ou procurera-t-elle des avantages supplémentaires aux grosses entreprises ? Et qu'en est-il de l'emploi, des besoins en personnel qualifié et des changements structurels et organiques ? Les forces du marché suffiront-elles à favoriser l'indispensable recyclage et la promotion des ressources humaines ? Encourageront-elles la réaffectation des travailleurs dans des domaines offrant de nouveaux emplois ? Quelle est l'incidence de la politique de concurrence sur la concentration grandissante des fournisseurs d'accès à l'Internet ? 
 

L'accès pour tous 

D'autres questions concernent l'accès à l'Internet ainsi que le contenu de l'information et des services. Si l'Internet devient un outil indispensable dans la vie quotidienne, comment peut-on garantir un accès peu coûteux aux consommateurs et aux citoyens ? Jusqu'à présent, en général, le "service universel" a garanti à chaque communauté des tarifs raisonnables pour le service téléphonique local. Les syndicats soutiennent fermement les mesures destinées à éviter l'inégalité d'accès et à garantir de nouvelles possibilités d'accès pour tous. A n'en pas douter, il faudra prendre des mesures réglementaires afin d'étendre la notion de service universel. Jusqu'à maintenant, l'utilisation des technologies de l'information et l'accès à l'Internet ont été réservés aux couches instruites et privilégiées des sociétés. Afin d'éviter l'exclusion sociale et de ne pas creuser encore davantage l'écart entre les nantis et les démunis de l'information le développement futur des réseaux et systèmes d'exploitation devra donc améliorer les possibilités d'accès et de choix. En outre, ce développement devra faire en sorte que tous les citoyens, indépendamment de leur situation géographique, sociale ou économique, aient accès à l'information publique et aient également l'occasion de participer grâce à la mise à disposition de services de base répondant aux besoins de toutes les couches de la société. 
 

Un contenu adapté et inoffensif 

Par ailleurs, on peut vraiment se demander si la réglementation du contenu, de la publicité et de la prévention de la fraude peut être laissée aux instances d'autoréglementation de l'industrie. Un libre flux d'information traversant les régions et les frontières nationales doit respecter les principes universels des droits de l'homme et la diversité culturelle. Lorsque l'on examine les problèmes de mise en vigueur de la réglementation destinée à empêcher la xénophobie, la violence, la sédition, le racisme, la pornographie et autres types de contenu inadapté ou offensif, on constate que ni les dispositifs d'autoréglementation de l'industrie ni les techniques de filtrage, d'une utilisation facile, n'offrent, à eux seuls, des solutions appropriées. Il existe de solides arguments en faveur de l'élaboration d'un code de conduite relatif à la mise à disposition de contenus adaptés et inoffensifs mais l'élaboration d'un tel code et la surveillance de son application sont des tâches qui incombent uniquement à l'industrie et aux entreprises. Outre un code de ce type, les techniques de filtrage peuvent soutenir les efforts des utilisateurs et des consommateurs qui cherchent à se protéger, eux et leurs enfants, contre les contenus nuisibles. 
 

Vie privée 

La fiabilité, la qualité de l'information, un pluralisme de haut niveau ainsi que la protection de la vie privée et le droit du particulier restent des préoccupations essentielles. Il est donc nécessaire de mettre au point un cadre juridiquement contraignant (comme la Directive de Protection des Données de l'Union européenne) déterminant les conditions en vertu desquelles les données personnelles peuvent être recueillies et traitées. Mais, en même temps, pour ce qui est des transactions électroniques, elles soulignent la nécessité de réduire au minimum la collecte de données personnelles et de protéger ces données au maximum. A l'avenir, le développement de la technologie et des réseaux devra renforcer les principes de protection existants. 
 

 Conclusion 

En résumé, les efforts qui vont être déployés pour développer l'Infrastructure mondiale de l'Information devront aller de pair avec des mesures efficaces prises par les pouvoirs publics sur un grand nombre de questions. En général, ces efforts devront viser à : 
 
- créer le cadre réglementaire nécessaire (mise à disposition d'accès peu coûteux aux consommateurs, protection de la vie privée, existence d'un pluralisme, garantie de contenus adaptés et inoffensifs, protection des droits d'auteurs et de la propriété intellectuelle, sécurité des transactions, base contractuelle sûre et stable, réglementation des paiements électroniques, interconnectivité et opérabilité) ;
- encourager le passage - acceptable par la collectivité - à une économie fondée davantage sur l'information (information et sensibilisation, soutien des PME, promotion des changements structurels, éducation et formation, collecte de données concernant des exemples de meilleure pratique) ; 

- éviter que le commerce électronique entraîne une érosion de la matière imposable ainsi que des efforts destinés à favoriser l'accès électronique à l'administration publique (y compris l'encouragement à la passation électronique des marchés publics).

Il est urgent de débattre publiquement de ces questions. Pourtant, toutes ces questions ne sont pas abordées de manière satisfaisante. Malgré les travaux en cours et un large éventail de programmes et de projets, il y a un manque de sensibilisation au rôle des acteurs, et en particulier des syndicats et des organisations de consommateurs. Jusqu'à présent, le débat n'a été conduit que par les intérêts des entreprises. On aborde rarement la question des changements en matière d'emploi, de travail et de formation au sein d'une nouvelle économie mondiale de l'information. Il en va de même pour l'évolution des entreprises et du travail ainsi que pour la promotion des ressources humaines. 

A partir de ce bref résumé, le TUAC, en étroite coopération avec ses membres affiliés et les SPI, va préparer une déclaration qui contiendra une évaluation des activités en cours à l'OCDE. 
 

 

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