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EVALUATION, PAR LE TUAC
DES RESULTATS DU "SOMMET DES HUIT DE DENVER"
Juin 1997
Synthèse
- Plus politique qu'économique, le Sommet de Denver a été
dominé par la première participation officielle du président
Eltsine à la plupart des discussions des chefs d'Etat et de gouvernement.
Deux déclarations finales ont été publiées
: - un communiqué du "sommet des Huit", de 90 paragraphes
et une déclaration économique au sommet, séparée,
émanant des sept principales démocraties industrialisées
(à l'exception de la Russie) sur la question de "Relever les
défis économiques et financiers mondiaux".
- Sur les principaux points de la discussion, le Sommet :
| est parvenu à un accord pour intégrer la Russie dans
le système multilatéral par le biais de sa participation
aux "réunions des sherpas" du "G8", sur son
adhésion immédiate au "Club de Paris" des nations
créditrices, sur son accession prochaine à l'OMC et sur la
poursuite du processus engagé en vue de l'adhésion à
l'OCDE (§2) ; |
| n'a pas accordé une grande importance à la discussion
sur l'emploi (§3-5) - la déclaration économique
du G7 énonce avec satisfaction que la croissance est "solide"
ou "s'accélère" et précise que des efforts
restent à accomplir "pour renforcer l'efficacité globale
des marchés, notamment du marché du travail". Les médias
ont accordé une grande attention aux faux débat entre les
partisans "triomphants" de la "flexibilité du marché
du travail" nord-américain et les opinions plus critiques en
provenance du continent européen. Deux autres conférences
du G7 sur l'emploi se tiendront avant le Sommet de Birmingham en 1998 ; |
| n'a pas réussi, en matière d'environnement (§12-30)
à parvenir à un accord sur des objectifs spécifiques
pour la réduction des émissions de gaz à effet de
serre ce qui aurait augmenté sensiblement les chances de progresser
lors de la Conférence des parties à la Convention cadre des
Nations Unies concernant les changements climatiques qui se tiendra à
Kyoto en décembre ; |
| a longuement examiné la situation des pays d'Afrique subsaharienne
(§54-66), en prenant des engagements (non quantifiés)
pour l'accès au commerce des produits en provenance des pays les
plus pauvres et pour continuer à leur apporter de l'aide. La déclaration
économique du G7 recommande un allégement encore plus important
de la dette des "pays les plus pauvres qui se réforment"
(§24) ; |
| a déclaré, à propos des questions globales et
politiques, que l'intégration mondiale a posé des "problèmes
complexes qui excluent toute réponse unilatérale" (§11)
et les a mentionnés de manière exhaustive dans les quatre-vingt-dix
paragraphes du communiqué. Finalement, le Sommet n'a pas dégagé
d'orientation ou de message politique clair. |
Croissance et emploi
- Lors de sa rencontre avec le président Clinton, la semaine précédant
le Sommet, la délégation syndicale avait incité les
dirigeants participant au Sommet à axer la réunion sur la
nécessité de s'attaquer aux "déficits sociaux"
du chômage, des inégalités de salaires et de l'insécurité
économique dans les pays du G7. Elle avait fait observer que les
changements politiques intervenus dans plusieurs pays du G7 représentaient
une occasion unique de commencer à incorporer une "dimension
sociale" au processus de mondialisation. Le communiqué du G8
comporte effectivement une section concernant les questions économiques
et sociales qui stipule que les gouvernements "doivent faire en sorte
que tous les secteurs de la société, que tous les pays du
monde, aient la possibilité de bénéficier de la prospérité,
fruit de l'intégration mondiale et des innovations technologiques."
(§4) et qu'ils "doivent tirer parti des possibilités
qui s'offrent en matière de croissance pour traiter les problèmes
du chômage et de l'insécurité économique."
Cependant, la déclaration économique du G7, rédigée
par les ministres des Finances du G7 et qui n'a été examinée
que brièvement par les chefs de gouvernement du G7, rappelle que
les ministres des Finances, les banques centrales et les marchés
financiers sont d'accord sur la nécessité de poursuivre des
politiques macro-économiques "saines", et d'une réforme
structurelle. Cela ne représente pas une initiative de croissance
mondiale. Les grands axes de la politique économique (p7) reprennent
les priorités actuelles des ministres des Finances : éviter
l'inflation et réduire le déficit aux Etats-Unis, mener des
"réformes structurelles" en Europe et encourager la demande
intérieure au Japon par le biais d'une déréglementation.
- A Denver, les dirigeants ont examiné la question de l'emploi,
à l'heure du déjeuner, et ont mis l'accent sur l'éducation
et la formation et sur une présentation, faite par l'Italie, du
rôle des petites et moyennes entreprises dans la création
d'emplois. Toutefois, le fait qu'à la veille du Sommet, les représentants
des Etats-Unis se soient targués un peu inconsidérément
des récents résultats très satisfaisants de l'économie
américaine, a conduit les médias à se polariser sur
un faux débat tendant à présenter le choix entre le
modèle américain et le modèle européen de marché
du travail comme un choix entre l'efficience et l'équité.
- L'examen de la question de l'emploi sera reprise dans une série
d'autres réunions du G7/G8 - une Conférence à "haut
niveau" sur l'Emploi à Kobe (Japon) en novembre, une autre
réunion des ministres des Finances et des Affaires sociales sur
"la croissance, l'employabilité et l'insertion" qui se
tiendra au Royaume-Uni au début de 1998 et le Sommet de Birmingham
en mai 1998. Ces réunions du G7/G8 seront précédées
par différentes réunions de l'OCDE et de l'Union européenne,
au niveau ministériel, sur l'Emploi, en octobre 1997. Le Chancelier
britannique de l'Echiquier a déclaré que les réunions
au Royaume-Uni porteront essentiellement sur la définition d'un
"troisième moyen" pour éviter les problèmes
de chômage structurel de l'Europe continentale et des "travailleurs
pauvres" en Amérique du Nord. Lors de la Conférence
du G7 sur l'Emploi, à Lille, en avril 1996, le président
Chirac avait utilisé le même terme pour définir ses
objectifs en matière d'emploi.
- Cette "avalanche" de réunions au sommet doit servir
à redéfinir la notion de "flexibilité du marché
du travail" qui est employée improprement et à construire
un consensus sur les mesures concrètes pouvant être prises.
Dans le passé, les discussions se sont trop appesanties sur la déréglementation
des marchés du travail, l'accroissement des inégalités
salariales et le manque de sécurité croissant des travailleurs
ayant un emploi et n'ont, par contre, guère aidé les chômeurs
à trouver un emploi. Il est temps de recentrer le débat et
d'axer l'attention sur les institutions en plein développement qui
encouragent les emplois exigeant du personnel très bien formé,
la participation des travailleurs et l'apprentissage à vie. Parallèlement,
il serait possible d'échanger des informations sur les moyens qui
permettent effectivement de réinsérer dans la vie active
les chômeurs et les exclus. L'objectif doit être d'atteindre
la croissance dans l'équité grâce à des marchés
du travail adaptables. La présence des partenaires sociaux à
ces réunions pourrait conduire à des résultats plus
concrets.
Stabilité du marché financier
- La déclaration économique du G7 (§11-14)
approuve et rappelle les conclusions d'un rapport séparé
des ministres des Finances présenté au Sommet, qui porte
sur "l'amélioration de la stabilité financière".
Ce rapport, préparé à la demande du Sommet de Lyon
en 1996, recommande de poursuivre les réformes dans divers domaines
couvrant l'activité des marchés financiers mondiaux : - le
renforcement de la coopération internationale entre les autorités
de contrôle des marchés financiers y compris la nomination
d'un coordinateur pour surveiller les échanges d'informations en
cas de problème ; la mise en oeuvre de mesures destinées
à renforcer la gestion des risques et améliorer la transparence
des marchés financiers ; l'adoption, par les économies de
marché émergentes, d'une série de "principes
de base" portant sur le contrôle bancaire, qui s'appuient sur
de solides normes prudentielles et devant être utilisés comme
référence par le FMI et la Banque mondiale pour la surveillance
et la formulation d'avis ; et la continuation du suivi de l'évolution
dans le domaine de la monnaie électronique.
- Ces réformes révèlent que les gouvernements sont
enfin disposés à prendre des mesures, si petites soient elles,
pour établir un cadre de référence régissant
les activités des marchés financiers mondiaux. On peut se
féliciter en particulier du soutien apporté aux changements
juridiques en vue d'améliorer la coordination entre les autorités
réglementaires et l'éventuelle nomination d'un superviseur
chargé de la coordination afin de faciliter les échanges
d'informations en cas "d'urgences" ; de l'obligation, pour les
banques, de conserver suffisamment de fonds propres pour se protéger
contre les risques des transactions financières et de la poursuite
des travaux au sujet des normes minimales de fonds propres et des opérations
sur les instruments dérivés. Cependant, dans la réalité,
ces réformes ne s'attaqueront qu'aux conséquences de l'instabilité
des marchés financiers et non pas aux causes et ne répondront
que partiellement à la demande - faite par les syndicats - d'un
nouvel ordre financier international en vue de restaurer l'équilibre
entre les économies réelles et financières comme il
était exposé dans la déclaration du TUAC au Sommet
du G7 à Halifax, en 1995.
Echanges, investissements et droits des travailleurs
- Les questions commerciales n'ont pas occupé une grande place
dans les discussions du Sommet de Denver, en partie à cause de l'ambiance
qui règne autour de l'examen, au Congrès américain,
de l'octroi à l'Administration du pouvoir de négociation
par la procédure accélérée ("Fast Track")
et du renouvellement du statut de NPF (nation la plus favorisée)
à la Chine. Les questions commerciales n'apparaissent pas dans le
communiqué du G8 et la déclaration économique du G7,
dans l'ensemble, résume les grands domaines d'activité qui
ont été approuvés lors de la Conférence des
Ministres de l'OMC à Singapour, en décembre dernier (§30-34).
Le G7 "espère" que les négociations sur l'Accord
multilatéral sur l'investissement, menées dans le cadre de
l'OCDE, aboutiront en 1998.
- Dans la section de la déclaration économique traitant
des échanges (§31), le paragraphe faisant référence
aux normes du travail reprend largement les termes employés dans
la déclaration de l'OMC à Singapour : "Tout en refusant
que les normes du travail soient utilisées à des fins protectionnistes,
nous réitérons notre attachement au respect des normes fondamentales
du travail internationalement reconnues". Toutefois, le Communiqué
du G8 comporte un passage positif sur la démocratie et les droits
de l'homme en général (§68-72). Les pays du G8
précisent qu'ils ont la responsabilité de "consolider
les valeurs démocratiques et les libertés fondamentales"
(§68) et qu'ils axeront leur "action sur les points suivants
: promouvoir une bonne gestion des affaires publiques et l'Etat de droit,
renforcer la société civile, développer la participation
politique des femmes, favoriser le soutien des entreprises et de la main
d'oeuvre à la démocratie, notamment dans les jeunes démocraties
et les sociétés en conflit" (§70). Ils soutiennent
l'adoption rapide d'une Convention de l'OIT sur l'élimination des
formes intolérables de travail des enfants. Ils travailleront avec
le Comité d'Aide au développement de l'OCDE et les organisations
non gouvernementales pour atteindre ces objectifs. Un rapport des ministres
a été demandé pour le prochain Sommet et pourrait
permettre d'entreprendre un examen plus large de la mise en oeuvre des
normes fondamentales du travail dans les stratégies de développement.
- La déclaration économique (§35) s'inquiète
des effets de la concurrence fiscale néfaste entre les Etats et
demande à l'OCDE de leur soumettre un rapport au prochain Sommet.
Environnement
- Une partie importante du communiqué du G8 est consacré
à tout un ensemble de questions concernant l'environnement. Pourtant,
le Sommet n'a pas réussi à progresser de manière significative
et, dans l'ensemble, le G7 a réaffirmé son intention de mettre
en oeuvre les engagements du passé. En matière de changement
climatique, la proposition faite par l'Union européenne en vue de
dépasser l'engagement pris au Sommet de Rio en 1992 et de réduire
les trois principaux gaz à effet de serre, de 15 pour cent d'ici
à 2010 a été bloquée par les Etats-Unis. Au
lieu de cela, le Sommet a décidé de "prendre des engagements
sur des objectifs significatifs, réalistes et équitables
entraînant des réductions des émissions de gaz à
effet de serre d'ici à 2010" (§16). Par ailleurs,
les gouvernements bénéficieront de la "flexibilité"
adéquate quant aux moyens d'atteindre ces objectifs.
- En ce qui concerne les questions de déforestation, d'eau douce,
de désertification, des océans et de la santé des
enfants et de l'environnement, le Sommet n'a pas réussi à
mettre en place de nouvelles politiques et de nouveaux objectifs pour s'attaquer
aux problèmes qui y sont liés. Pour ce qui est du rôle
des institutions internationales, les Nations Unies et leurs institutions
spécialisées ont été choisies comme étant
"l'instance stratégique pour la coordination des aspects sociaux,
environnementaux et économiques du développement durable".
La proposition allemande de créer une Organisation mondiale de l'Environnement
parallèlement à l'Organisation mondiale du Commerce a été
rejetée.
Développement, Afrique et institutions financières
internationales
- On peut se réjouir de l'inclusion d'une section spéciale
sur l'Afrique dans la déclaration politique. Le soutien de la démocratie
et de la bonne gestion des affaires publiques est essentiel. Alors que,
de toute évidence, les échanges occuperont une place fondamentale
dans la croissance de l'Afrique, il ne faut pas sous-estimer l'importance
d'un courant continu d'Aide publique au développement (§59)
car, actuellement, l'Afrique ne reçoit pas de flux d'investissements
privés. Les pays du G7 devraient harmoniser leurs actes avec leurs
discours en inversant la tendance à la baisse continue des volumes
d'APD qui ne sont jamais tombés aussi bas.
- Sur la question de l'allégement de la dette, la déclaration
économique n'a pas apporté de réponse aux inquiétudes
formulées par les syndicats avant le Sommet du G7. En particulier,
les questions concernant le nombre de pays qui pourraient être éligibles
dans le cadre de l'initiative en faveur des pays les plus pauvres fortement
endettés (HIPC - Heavily Indebted Poorest Countries Initiative),
l'encours total de la dette à couvrir et le "point d'achèvement"
pour les pays bénéficiaires, n'ont pas été
résolues de manière satisfaisante. Des progrès devront
être réalisés d'ici les réunions d'automne du
FMI et de la Banque mondiale.
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