1997 - Communique de l'OCDE

 

 



English text

Communiqué publié par le Conseil de l'OCDE
Au niveau des Ministres
Paris, 26-27 mai 1997
EVALUATION DU TUAC

Aperçu général

  1. Trois points étaient inscrits à l'ordre du jour du Conseil de l'OCDE au niveau des Ministres de 1997:- favoriser une croissance durable et la cohésion sociale; poursuivre la libéralisation des échanges et des investissements; et le rôle futur de l'OCDE même. Le communiqué publié à l'issue de la réunion a accordé une plus grande attention que les années précédentes aux risques inhérents à la situation actuelle, mais concrètement sa réponse consiste à répéter le message familier que les gouvernements doivent maintenir la "discipline macroéconomique" et progresser dans les "réformes d'ensemble des marchés des produits et des facteurs". Néanmoins, des différences d'objectif apparaissent et le Secrétaire général de l'OCDE a lui-même attiré l'attention sur le fait que le progrès social doit marcher de pair avec le développement économique si l'on veut maintenir la stabilité politique, mais on notera l'absence de la "dimension sociale" dans ses commentaires sur les objectifs de la réunion.
  2. Au cours de la consultation avec les Ministres, le TUAC a fait une mise en garde contre l'austérité budgétaire et l'accroissement de l'insécurité de l'emploi qui aboutiront au rejet par la population de la mondialisation. M. Jean Arthuis, Président de la consultation et Ministre français de l'Economie d'alors (avant d'être battu aux élections une semaine plus tard), a déclaré que les électeurs ne comprenaient pas clairement les avantages de la mondialisation. Des différences nuancées sont apparues dans le débat ministériel en ce qui concerne la portée de politiques macroéconomiques davantage axées sur la croissance et le contenu des réformes du marché du travail. L'avenir de l'OCDE pourrait bien dépendre de sa capacité d'anticiper le débat public dans ces domaines, et non de le suivre, et de jouer ainsi le rôle de catalyseur de l'action des gouvernements sur la dimension sociale de la mondialisation.
  3. La priorité centrale de l'OCDE doit être de déplacer l'accent de la "flexibilité négative du marché du travail" à la réalisation d'une adaptation des marchés du travail permettant de générer des emplois de haute qualité qui maintiennent la cohésion sociale. En se concentrant sur les problèmes des bas salaires, les politiques actives du marché du travail et l'apprentissage à vie, la réunion des Ministres du Travail de l'OCDE en octobre prochain pourrait constituer une étape importante. L'OCDE pourrait alors apporter une contribution plus utile au programme d'action susceptible d'évoluer aux réunions du G7/G8 après le Sommet de Denver - la Conférence du G7 sur l'Emploi à Kobe en novembre 1997, une éventuelle Conférence du G7/G8 sur l'Emploi au Royaume-Uni et le Sommet du G7/G8 à Birmingham en 1998.


Favoriser une croissance durable et la cohésion sociale (§6)

  1. De l'avis des Ministres de l'OCDE, l'essentiel des politiques nécessaires pour favoriser une croissance durable et la cohésion sociale repose sur des finances publiques "saines", un contrôle vigilant de l'inflation et une plus grande réforme structurelle, comprenant "l'élimination" des rigidités structurelles sur les marchés des facteurs (c'est à dire les marchés du travail) et une réforme plus élargie de la réglementation. Bien que le Communiqué convienne "qu'il faut s'attacher à améliorer les perspectives d'avenir des éléments les plus vulnérables de la société", il omet de mentionner les moyens d'y parvenir dans un contexte d'austérité budgétaire et de réglementation moindre des marchés du travail soit par le biais de la législation soit par les conventions collectives. Le communiqué reste en deçà des demandes syndicales pour des politiques de croissance plus expansionnistes et une distribution plus équitable des fruits de la croissance.


Politique macroéconomique (§7-8)

  1. Il semble que les prévisions de croissance pour l'ensemble de la zone OCDE aient été légèrement révisées à la hausse pour 1997-98, maintenant estimées en moyenne à 2.5 - 3 pour cent, sur la base d'une reprise attendue de l'activité en Europe continentale. Il est significatif que le communiqué reconnaisse l'existence d'écarts de production dans certains pays et la nécessité "de divergences dans l'orientation à court terme des politiques macroéconomiques". C'est aussi presque reconnaître la nécessité d'une politique monétaire davantage axée sur la croissance en Europe continentale et la nécessité d'éviter les tensions excessives au Japon. Une coopération continue en matière de taux de change est également requise.
  2. La réduction des déficits budgétaires devrait rester une priorité dans "la plupart des pays" contrairement à l'ensemble de la zone OCDE. La réduction des déficits doit être principalement recherchée par une diminution des dépenses mais aussi par une amélioration de la qualité des dépenses qui exige qu'on s'attache davantage "aux programmes qui contribuent à la croissance économique par un développement du capital humain et de l'innovation".


Emploi et mise en oeuvre de la Stratégie de l'OCDE pour l'emploi (§9-12)

  1. Le communiqué reconnait que le principal défi économique pour les gouvernements est de mettre fin au chômage. Il fait valoir que s'il est pour l'essentiel de nature structurelle, le chômage est aussi en partie de nature conjoncturelle dans certains pays. Il est maintenant admis que dans certains pays le fossé entre les "nantis" et les "plus démunis" "s'est sans doute creusé" ; que les disparités croissantes de revenus ou l'inégalité des chances sont préoccupantes ; et qu'il faut empêcher une dérive vers le chômage de longue durée et l'exclusion sociale. Il est également nécessaire de mettre en place des politiques qui facilitent l'accès au travail, favorisent la création d'emplois et améliorent les perspectives de gains.
  2. En ce qui concerne le rôle des recommandations de la Stratégie pour l'emploi, le communiqué tend à adopter une vue plus équilibrée de la direction à suivre que ne le fait le Comité d'Examen des Situations Economiques et des Problèmes de Développement de l'OCDE (Comité EDR) chargé de surveiller leur application. Peu est dit sur la nécessité de réduire le salaire minimum et d'affaiblir les négociations collectives de manière à accroître l'inégalité des salaires, considérée hautement prioritaire dans les travaux du Comité EDR et il est fait grand cas de la nécessité de politiques actives du marché du travail bien conçues, en partie écartées par le Comité EDR. Une attention particulière est accordée aux réformes des systèmes d'imposition et de prestations pour renforcer les incitations à rechercher et à conserver un emploi ; à l'importance de l'adoption de "pratiques exemplaires" pour la diffusion de l'innovation et de la technologie; à l'amélioration des compétences et la nécessité de mettre en oeuvre des stratégies de formation continue; et au maintien d'une participation active des groupes à risque à la vie sociale. L'OCDE demande qu'un rapport actualisé de la mise en oeuvre lui soit présenté à sa prochaine réunion et qu'un nouvel examen d'ensemble soit réalisé en 1999.


Poursuivre la libéralisation des échanges et des investissements (§19-29)

  1. Contrairement aux années précédentes, les politiques commerciales ne sont pas au premier plan du Conseil ministériel. Le communiqué fait référence aux résultats de la Conférence ministérielle de l'OMC, tenue à Singapour (qui a donné "une forte impulsion à l'effort de libéralisation"), et souligne le rôle complémentaire de l'OCDE dans la préparation des prochaines négociations sur les échanges par le biais d'analyse du commerce et de l'interdépendance entre les politiques nationales et le commerce international (les soi-disant "nouvelles questions du commerce"). Bien que la formule du paragraphe 25 sur "les interactions entre la politique commerciale et les autres politiques" ne donne pas de taxonomie, elle est implicitement supposée couvrir l'environnement, la concurrence, l'investissement et probablement les normes du travail également.
  2. L'Etude de l'OCDE sur le Commerce, l'emploi et les normes du travail, publiée en 1996, a contribué utilement au débat international. Si l'OCDE veut garder toute sa pertinence dans l'élargissement du débat sur la dimension sociale de la mondialisation, elle doit poursuivre ses travaux dans ce domaine. Il est par conséquent significatif que le communiqué observe "qu'il est important de tirer parti des travaux de l'OCDE sur cette question pour mieux en comprendre tous les aspects". Il semble qu'un certain nombre de pays aient donné leur soutien à la poursuite des travaux de l'OCDE dans ce domaine et il y aura lieu de suivre dorénavant cette question. Les Ministres de l'OCDE ont également réitéré la formule adoptée dans la déclaration ministérielle de Singapour, à savoir "Les Ministres réaffirment leur engagement d'observer les normes fondamentales du travail internationalement reconnues et de ne pas utiliser ces normes à des fins protectionnistes".
  3. Dans une déclaration séparée sur l'Accord Multilatéral sur l'Investissement (AMI), les Ministres sont "déterminés" à conclure l'Accord à temps pour la réunion ministérielle de l'an prochain. Toutefois, il y a actuellement environ 600 réserves qui ont été émises par les pays Membres sur le projet d'accord existant. Un rapport sur l'état d'avancement des négociations présenté aux Ministres par le Groupe de Négociation sur l'AMI indique qu'il y a recherche de consensus sur l'annexion des Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des Entreprises Multinationales à l'Accord Multilatéral sur l'Investissement. Le TUAC est d'avis que cette annexion doit être réalisée de manière claire et forte et qu'elle doit être accompagnée d'une clause sociale et environnementale contraignante dans le texte même de l'Accord.
  4. Les autres questions qui ont été examinées dans cette partie du débat ministériel concernent un ensemble de pratiques faussant les échanges et la concurrence auquel le Conseil ministériel a décidé de s'attaquer :- une fois ratifié, l'Accord de l'OCDE sur la construction navale devrait établir des conditions normales de concurrence dans l'industrie de la construction navale ; - les négociations sur les crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien public concernant les produits agricoles devraient être menées à bien "dès que possible" ; - le principe d'une approche globale de l'OCDE visant à combattre la concurrence fiscale dommageable entre les pays a été approuvé et un rapport devrait être soumis au Conseil ministériel de l'OCDE en 1998 ; - une nouvelle Convention sur la lutte contre la corruption dans les transactions commerciales internationales devrait être menée à bien d'ici à la fin de cette année, en vue d'incriminer la corruption d'agents publics étrangers en matière de surenchère dans les contrats d'investissement. La Convention devrait entrer en vigueur dans le courant de 1998.


Le rôle mondial de l'OCDE (§30-40)

  1. Le débat sur la composition future de l'OCDE a été dominé par la signature du Traité sur l'élargissement de l'OTAN, qui a eu lieu en parallèle à Paris, et la discussion sur le traitement de la demande d'adhésion à l'OCDE présentée par la Fédération de Russie. L'adhésion reste une possibilité à moyen terme, l'objectif à court terme étant une intensification de la coopération "pour aider la Fédération de Russie à mettre en place une véritable économie de marché dans le cadre d'institutions démocratiques" (le protocole a été signé le 27 mai 1997). L'établissement d'un Comité de Liaison entre l'OCDE et la Russie en témoigne. La question de savoir si l'OCDE doit pour le moment maintenir sa composition actuelle après la probable adhésion de la République slovaque ou bien si selle doit envisager de nouvelles et prochaines adhésions, notamment celles de certains pays d'Amérique Latine, a suscité des avis partagés parmi les pays Membres.
  2. Compte tenu "des pressions persistantes s'exerçant sur les ressources de ses Membres", le processus de réforme engagé à l'OCDE a été bien accueilli, malgré les tensions susceptibles d'apparaître bientôt entre les impératifs de réforme de fonctionnement et de réforme budgétaire. L'OCDE devra aussi probablement développer une "stratégie de communication" et établir "un rapport pour expliquer les avantages de la libéralisation des échanges et de l'investissement". Le TUAC appelle depuis longtemps à un programme interne de l'OCDE visant un débat et un dialogue plus intensifs avec les partenaires sociaux et est prêt à y jouer un rôle actif et constructif. Toutefois, ce processus devrait être à deux sens et pas simplement un mécanisme permettant aux économistes "d'expliquer" au public "les avantages" de leurs politiques.

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