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DECLARATION SYNDICALE À LA RÉUNION DE 1999 DU CONSEIL DE L'OCDE AU NIVEAU
MINISTÉRIEL ET AU SOMMET ÉCONOMIQUE DU G8 À COLOGNE
Mai 1999
Mondialisation : la nécessité d'une nouvelle orientation
1. Les marchés financiers se sont quelque peu redressés
depuis la quasi débâcle de 1998. Cependant la crise financière
a entraîné un ralentissement de la croissance et la récession.
Trente pour cent de l'économie mondiale se trouvent maintenant en
récession et la Banque mondiale prévoit qu'en 1999, la croissance
mondiale sera la plus faible depuis 1982. En Russie, le processus de transition
est encore plus défaillant et plus d'un tiers de la population active
ne reçoit plus de salaire. Au Brésil, les marchés
financiers se sont stabilisés mais seulement au prix d'une récession
dont l'intensité et la durée restent incertaines. Le Japon
est embourbé dans la récession tandis que l'Union européenne
connaît un ralentissement de sa croissance et enregistre des résultats
bien inférieurs à ses capacités. Seuls les Etats-Unis
ont une économie soutenue.
2. Une question essentielle qui se pose est de savoir combien de temps
cette situation fragile pourra se prolonger. Le fait d'avoir l'économie
des Etats-Unis comme seule locomotive de l'économie mondiale représente
des risques énormes. Si cette locomotive devait caler, l'économie
mondiale plongerait rapidement dans une crise profonde. Les gouvernements
doivent prendre conscience de ces risques et agir rapidement pour encourager
une croissance équilibrée de manière à diversifier
les sources d'expansion exerçant leur action dans l'économie
mondiale.
3. Une cause fondamentale de la crise économique et financière
qui s'est développée au cours de ces deux dernières
années est la poursuite aveugle de la libéralisation financière
en l'absence de la mise au point de cadres appropriés de réglementation
aux niveaux national et international. Et par voie de conséquence,
la fuite généralisée des capitaux a déstabilisé
l'économie mondiale. Les politiques d'austérité imposées
aux pays concernés ont causé des ravages au niveau national
et réduit la croissance mondiale de la demande. Parallèlement,
en s'obstinant à ignorer les conséquences sociales de la
libéralisation des échanges et des capitaux, les dirigeants
risquent de provoquer une réaction violente contre la mondialisation.
4. Face à cette situation, les principales économies et
institutions internationales doivent tirer de la crise les enseignements
qui s'imposent et réorienter les politiques publiques de gestion
des marchés mondiaux. Il est urgent de renforcer la transparence
et la responsabilité démocratique des gouvernements et des
institutions. La réunion du Conseil de l'OCDE au niveau ministériel
et le Sommet du G8 à Cologne offrent l'occasion de donner une impulsion
à cette nouvelle orientation. En particulier, les gouvernements
doivent :
- prendre des mesures concertées pour rétablir une croissance
équilibrée de la demande dans l'économie mondiale
afin de prévenir le risque de déflation (§ 5-11) ;
- annuler les dettes multilatérales et bilatérales des
pays en développement les plus pauvres à condition qu'ils
respectent les droits fondamentaux de l'homme (§ 8) ;
- s'inspirer des principes formulés lors de la Conférence
des ministres du Travail du G8, à Washington, pour élaborer,
à l'échelle mondiale, des dispositifs de protection sociale
à large participation (§ 10) ;
- créer une Commission internationale d'enquête sur le
système de réglementation nécessaire à la gestion
des marchés financiers internationaux (§ 12-16) ;
- agir de manière décisive avant la réunion du
Conseil ministériel de l'OMC à Seattle pour faire en sorte
que le système mondial des échanges et de l'investissement
et les institutions financières internationales viennent renforcer
le travail de l'OIT visant à garantir les normes fondamentales du
travail (§ 17-19 ) ;
- au niveau de l'OCDE et du G8, entamer un dialogue sur l'emploi avec
les partenaires sociaux en vue de convenir d'une approche de l'adaptabilité
du marché du travail qui soit acceptable par la collectivité
(§ 20-22) ;
- donner au développement durable une dimension sociale et concernant
l'emploi (§ 23).
Développer la demande mondiale
5. En conséquence de la crise asiatique, l'économie mondiale
est confrontée à un grave risque de déflation et d'une
nouvelle montée du chômage. L'explosion du déficit
commercial des Etats-Unis représente une nouvelle cause d'instabilité
financière. Les banques centrales et les ministres des Finances
des pays de l'OCDE doivent s'y opposer en prenant des mesures concertées
destinées à soutenir une croissance équilibrée
de la demande et à relancer ainsi la croissance et la création
d'emplois.
6. L'expansion économique de l'Europe est essentielle
puisque l'Europe représente approximativement trente pour cent de
l'activité économique mondiale. De surcroît, son activité
économique reste bien en dessous d'un niveau qui peut et doit être
maintenu si l'on veut réduire le chômage et faire en sorte
que l'Europe assume ses responsabilités dans l'économie mondiale.
La diminution récente des taux d'intérêt par la Banque
centrale européenne est bienvenue quoique les taux réels
soient encore trop élevés. Leur baisse tardive illustre aussi
les faiblesses du dispositif de prise de décisions économiques
depuis sa mise en place par l'Union économique et monétaire.
Il est capital de veiller à ce que la croissance de la demande corresponde
à l'offre potentielle pour que l'on puisse s'attaquer aussi aux
faiblesses structurelles. Il faut également se doter des moyens
de mener une politique budgétaire au niveau européen afin
de compléter la politique monétaire unique.
7. Au Japon, il faut continuer de prendre des mesures radicales
pour stimuler la demande intérieure. Il y a lieu d'introduire des
réductions fiscales permanentes et de mettre en place des régimes
de retraite pour toutes les familles actives mais notamment pour les familles
aux revenus les plus bas de manière à ce qu'elles se sentent
en confiance pour consommer biens et services.
8. Les gouvernements des pays du G8 et de l'OCDE devraient maintenant
annuler les dettes bilatérales des pays en développement
les plus pauvres et autoriser les institutions financières internationales
à se procurer des financements suffisants pour faire de même.
Ce serait là une manière judicieuse de réagir au sentiment
de l'opinion publique qui s'est manifesté par le biais de la coalition
"Jubilé 2000". Cette annulation de dettes devrait dépendre
du respect, par les pays concernés, des droits fondamentaux de l'homme
y compris les droits des travailleurs.
9. Il faut donner aux pays en crise d'Asie et d'Amérique
latine les moyens de développer la demande intérieure et
contribuer à rétablir la croissance de l'économie
mondiale. Les programmes de stabilisation convenus avec le FMI doivent
abandonner l'austérité au profit du soutien de la croissance.
Les arriérés de salaire dus aux travailleurs russes doivent
maintenant être payés afin de sortir un tant soit peu du cercle
vicieux qui a conduit à une moins-value de recettes fiscales et
à une prolongation de la crise financière. Le fardeau retombe
essentiellement sur les femmes qui, en l'absence de dispositifs de sécurité
sociale adéquats, ont en grande partie la charge de maintenir l'union
de la famille et de s'occuper des enfants et des personnes âgées
en ne comptant que sur des revenus familiaux considérablement réduits.
10. Dans les pays en crise, les politiques axées sur la croissance
doivent être étayées par une aide financière
pour atténuer la pauvreté et par la mise en place de systèmes
de sécurité sociale à large participation. La Banque
mondiale a maintenant publié son Code social auquel il faut souscrire.
La conférence des ministres du Travail du G8 qui s'est tenue à
Washington en février 1999 a défini les éléments
d'une approche de ce type : le soutien international des économies
en développement, en transition et émergentes doit être
centré sur les pays les plus touchés par la crise et sur
la population la plus vulnérable de ces pays. Les priorités
sont les suivantes :
- protéger les budgets de l'éducation et de la santé
en veillant à ce que les plus démunis puissent continuer
à payer la scolarité de leurs enfants et avoir accès
aux soins de santé essentiels ;
- créer et développer des dispositifs de sécurité
sociale pour faire en sorte que les personnes sous-employées et
sans travail disposent d'un revenu suffisant pour vivre, et élargir
les programmes de suppression du travail des enfants, soutenus par l'OIT
;
- promouvoir des programmes de travaux publics qui favorisent l'emploi
et élargir les programmes de formation et de recherche d'emploi
;
- diminuer les prix des produits essentiels et maintenir le pouvoir
d'achat des salaires minimums ;
- mettre en place de solides systèmes de relations professionnelles
en encourageant un dialogue tripartite entre gouvernements, employeurs
et syndicats, fondé sur le respect des normes fondamentales du travail
de l'OIT.
11. Les gouvernements doivent relever le défi, dans le contexte
de la mondialisation, de maintenir une base d'imposition solide pour les
finances publiques. Le fait de ne pas avoir imposé suffisamment
les revenus du capital et les bénéfices a provoqué
une érosion de l'assiette fiscale et un glissement du fardeau fiscal
vers les travailleurs qui en supportent une part disproportionnée.
Le déplacement de la taxation du revenu vers la taxation de la consommation
a rendu les systèmes plus régressifs. Il faut passer des
accords internationaux pour garantir une imposition équilibrée
du capital et des bénéfices de manière à conserver
le soutien de l'opinion publique en faveur de systèmes d'imposition
équitables.
Le système financier international - la réglementation
du marché
12. La récente crise a révélé les faiblesses
du système financier international. Les erreurs commises par les
financiers et les banquiers ont maintenant des répercussions directes
sur la vie de millions de familles actives. La reconstruction de l'architecture
financière internationale est devenue une tâche fondamentale.
Jusqu'à présent, la réaction des pouvoirs publics
face aux crises successives des marchés financiers a consisté
à prendre des initiatives destinées à améliorer
la transparence et la surveillance. Il est indubitable que celles-ci sont
nécessaires mais elles ne permettent pas de s'attaquer à
la cause première du problème. Rien ne prouve que le manque
de transparence et de surveillance sont à l'origine des crises récentes.
Par contre, il est manifeste que les bailleurs de fonds ne se sont pas
servis d'un grand nombre d'informations qui étaient disponibles.
La crise de l'épargne et des prêts des années 80 aux
Etats-Unis et la crise bancaire scandinave des années 90 montrent
que les crises financières peuvent se produire dans le cadre de
systèmes transparents et bien réglementés. La leçon
qu'il faut en tirer est que pour assurer la stabilité du système
financier international, il faut prendre des mesures plus audacieuses.
Le retour à une croissance durable exigera une réforme profonde
des moyens dont se servent les gouvernements pour réglementer et
gérer, par le biais du réseau d'institutions et d'organisations
financières internationales, le marché mondial et, en particulier,
les marchés financiers. L'objectif doit être de réaménager
les marchés financiers afin de faciliter l'investissement productif
à long terme.
13. Pourtant, le débat mené par les banquiers et les fonctionnaires
des ministères des Finances s'est tenu à huis clos sans la
participation officielle des syndicats et de la société civile.
Le "Forum de stabilisation financière" nouvellement créé
par le G7 et qui sera convoqué par la présidence de la Banque
des règlements internationaux comprend des fonctionnaires du G7
et des représentants des établissements financiers et des
banques privés. Là encore, il s'agit d'un club fermé.
La réglementation est une affaire trop importante pour être
laissée aux responsables de la réglementation. Les gouvernements
doivent donc établir une Commission internationale indépendante,
à large participation, ayant pour mandat de rendre compte rapidement
du cadre international de réglementation qu'il faut maintenant mettre
en place. Dans un premier temps, le Forum de stabilité financière
devra tenir des séances et des consultations publiques.
14. Les mesures à prendre sont les suivantes :
- assurer une meilleure coordination de la politique budgétaire
et monétaire au niveau régional et entre les nouveaux blocs
de monnaies de réserve que sont le dollar, le yen et l'euro pour
faire en sorte que les taux de changes reflètent les facteurs économiques
de base plutôt que des opérations spéculatives et aboutissent
à la suppression progressive des déficits et des excédents
importants à long terme de la balance des opérations courantes
;
- reconnaître le droit des gouvernements à contrôler
les entrées et les sorties de capitaux étrangers à
court terme dans l'intérêt de la stabilité macro-économique
et sociale nationale ;
- appliquer une taxe internationale sur les transactions en devises
étrangères afin de réduire les flux monétaires
spéculatifs ;
- instaurer des normes internationales contraignantes pour la réglementation
prudentielle des marchés financiers comportant des normes en matière
de réserve de capitaux, des limites aux risques de change à
court terme des devises étrangères, des contrôles et
l'homologation des transactions de produits dérivés et d'autres
formes d'investissement à effet de levier reposant sur le crédit
;
- améliorer les informations sur les flux monétaires,
les dettes privées et les réserves ;
15. Le rôle de régisseur de l'économie mondiale
joué par le FMI est très préoccupant. La crise a également
montré que les propositions d'amendement des statuts du FMI pour
encourager la convertibilité totale des opérations en capital
relèvent de la folie. Les recommandations pratiques initiales du
FMI en Asie de l'Est et au Brésil ont détérioré
encore davantage la conjoncture en péchant par excès de rigueur
et d'austérité dans des pays qui n'avaient pas de déséquilibres
macroéconomiques essentiels. Il faut maintenant réformer
le FMI comme l'a préconisé le Sommet des Nations Unies pour
le développement social, qui s'est tenu à Copenhague. Les
programmes futurs devraient encourager la bonne gestion des affaires publiques,
la croissance de l'emploi et la réduction de la pauvreté
plutôt que l'austérité. Les missions régulières
(article 4) du FMI dans les pays doivent maintenant rencontrer périodiquement
les représentants syndicaux.
16. Parallèlement aux améliorations du système
de gestion financière internationale, il faut disposer de meilleures
normes de gouvernement d'entreprise. Les Principes relatifs au gouvernement
d'entreprise qui devront être adoptés par les ministres de
l'OCDE constituent un ensemble de droits pour toutes les parties prenantes.
Ces dispositions devront se traduire par des efforts de promotion et notamment
un travail d'ouverture vers l'extérieur. Il faut également
renforcer les mesures destinées à lutter contre la corruption
en s'appuyant sur les instruments de l'OCDE et les mettre en oeuvre en
coopération avec les syndicats et les entreprises.
Changer la face sociale de la mondialisation
17. La crise a démontré le danger d'ignorer la dimension
sociale de la mondialisation ce qui a entraîné une réaction
violente de grande envergure à l'encontre du système des
échanges et de l'investissement et faussé les tentatives
de négociation, à l'OCDE, de ce qui aurait été
un AMI (Accord multilatéral sur l'Investissement) déséquilibré.
A l'avenir, les règlements régissant ces systèmes
devront comprendre des obligations contraignantes vis-à-vis de la
collectivité et de l'environnement, allant de pair avec les droits
accordés aux pays ou aux entreprises. La réunion ministérielle
de 1999 de l'OMC, qui se tiendra à Seattle pour lancer un nouveau
Round de négociations, représentera le premier test véritable.
Il faut concevoir un Round à large participation afin de favoriser
l'emploi et d'améliorer les niveaux de vie aussi bien dans les pays
développés que dans les pays en développement plutôt
que de déréglementer les marchés et d'intensifier
les forces compétitives. Outre les préoccupations relatives
à l'environnement, à l'avenir les négociations devront
prendre en compte la promotion des normes fondamentales du travail et leur
inclusion dans l'examen des politiques commerciales et créer un
organe approprié au sein de l'OMC. Il faut prendre des mesures d'ordre
pratique visant à renforcer la coopération entre l'OIT et
l'OMC. Il s'agit là d'un minimum si l'on ne veut pas mettre en danger
l'indispensable soutien de l'opinion publique pour la mise en oeuvre de
conclusions concertées.
18. Les stabilités financière, économique et sociale
sont liées entre elles. Des politiques de stabilisation qui font
injustement pression sur les travailleurs conduiront à la déstabilisation
sociale. Elles seront finalement vouées à l'échec
et nuiront encore davantage à la crédibilité du FMI
et de la Banque mondiale. Il faut également instaurer un dialogue
social entre gouvernements, syndicats et employeurs pour établir
un consensus sur les objectifs de développement social et économique
et sur les moyens d'action. Des institutions sociales fortes et notamment
des syndicats, sont indispensables à la mise en valeur des ressources
humaines et à l'arbitrage des différends concernant la répartition
des ressources. La nouvelle architecture pour la stabilité financière
mondiale et le développement durable doit inclure le code social
tel qu'il a été élaboré par le G8 et la Banque
mondiale.
19. Les institutions de Bretton Woods et les banques régionales
de développement doivent inclure dans leurs règles de fonctionnement
l'obligation, pour les pays, d'adhérer à la Déclaration
de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux au travail. Pour
avoir droit à l'aide permanente à l'ajustement, les pays
doivent respecter et appliquer les normes fondamentales du travail. Les
ministères des Finances et les institutions financières internationales
doivent rompre avec la tradition selon laquelle la mise en oeuvre des normes
du travail est considérée comme étant uniquement du
ressort des ministres du Travail. Des normes de ce type sont nécessaires
pour assurer que les marchés du travail engendrent une répartition
satisfaisante du revenu pouvant financer ensuite un réel développement
économique fondé sur l'expansion des marchés nationaux.
Elles sont également nécessaires pour faire naître
les pouvoirs politiques compensateurs en mesure d'arrêter la corruption,
phénomène qui a faussé le processus de développement
et ébranlé l'efficience allocative et la stabilité
des marchés financiers. Les Principes directeurs de l'OCDE à
l'intention des entreprises multinationales devraient être mis à
jour afin d'y inclure toutes les normes fondamentales du travail. Mais
pour que ces Principes soient valables, il faut que le réexamen
en cours fasse en sorte de les doter d'un mécanisme efficace de
mise en oeuvre.
Dialogue du G8 sur l'emploi
20. Transformer la croissance soutenue de la demande en création
d'emplois et réduire le chômage exige des mesures destinées
à favoriser l'adaptabilité des marchés du travail
et une synchronisation de la demande et de l'offre des économies.
La mise en oeuvre, pays par pays, de la Stratégie de l'OCDE pour
l'emploi met strictement l'accent sur la déréglementation
du marché du travail ce qui équivaut à affaiblir les
syndicats et démanteler les structures de négociation des
salaires, diminuer la protection de l'emploi pour les travailleurs et pénaliser
les chômeurs. Il faut adopter une nouvelle approche. Dans l'économie
mondiale un avantage compétitif ira aux pays dotés d'une
forte cohésion sociale fondée sur un investissement dans
l'éducation, la formation et les soins de santé, et disposant
d'un solide système de relations professionnelles, s'appuyant sur
de puissants syndicats. Les pays développés et en développement
qui réussiront le mieux seront ceux qui disposeront d'institutions
capables d'équilibrer et de rééquilibrer les pressions
du marché en faveur de la flexibilité et du dynamisme et
les pressions sociales en faveur de la sécurité et de la
dignité. Les populations doivent avoir voix au chapitre en ce qui
concerne leurs conditions d'emploi et le développement économique.
21. Les gouvernements du G8 et de l'OCDE s'accordent à reconnaître
que l'investissement dans le capital humain est primordial pour l'avenir.
Cependant, il y a encore beaucoup plus à faire pour trouver les
moyens de financer l'apprentissage à vie qui créé
un capital humain, par le biais d'investissements par les entreprises,
les particuliers et le secteur public. Chacun des pays ne pourra apporter
une réponse efficace aux questions de financement public et privé
de l'éducation et de la formation qu'en établissant des partenariats
dans le cadre desquels s'instaurera une coopération entre les ministères
de l'Education et du Travail d'une part et les syndicats et les employeurs
d'autre part.
22. En Europe, un processus est maintenant en marche pour la mise en
oeuvre des objectifs portant sur les questions d'emploi, qui ont été
définis lors du Sommet de Luxembourg en 1997. Au niveau du G8 et
de l'OCDE, les syndicats sont prêts aussi à entamer des dialogues
avec les gouvernements et les entreprises en vue de gérer le changement
économique. Les terrains d'entente éventuelle portent sur
ce qui suit :
- faire de l'apprentissage à vie une réalité en
améliorant les compétences des travailleurs et en réformant
les systèmes éducatifs ;
- instaurer une compatibilité entre les systèmes de prestations
sociales, les salaires minimums et les régimes de rémunération
afin de supprimer la pauvreté et de faciliter l'intégration
des marchés du travail ;
- veiller à l'efficacité des programmes actifs visant
le marché du travail pour aider les groupes et régions à
risques ;
- intégrer les jeunes et les femmes au marché du travail
;
- exploiter l'évolution technologique, encourager les approches
globales de l'innovation et favoriser les formes d'organisation du travail
acceptables par la collectivité.
23. Le retour de la croissance de la demande et de l'emploi doit intervenir
dans le cadre du développement durable comme cela a été
convenu dans les 'piliers' social, environnemental et économique
du Programme Action 21 des Conférences de Rio. Les mesures sociales
visant à atténuer les effets des suppressions d'emplois et
assurer l'équité doivent être au coeur même des
stratégies de mise en oeuvre du développement durable. Pour
ce faire, il faut une action conjointe des ministres du Travail, des Finances
et de l'Environnement et de leurs organisations internationales respectives,
avec l'OCDE qui peut jouer le rôle de catalyseur. La finalité
majeure d'une stratégie de développement durable devrait
être de faire en sorte que les travailleurs et leurs syndicats participent
à l'indispensable réforme des modes de production et de consommation
mondiaux écologiquement non viables. En l'absence d'un tel engagement,
les objectifs de réforme ne continueront de connaître qu'un
succès limité. La transition en matière d'emploi doit
donner aux travailleurs la conviction qu'ils ne perdront pas leurs moyens
de subsistance en dépit des mutations structurelles.
Conclusions
24. Prévenir un effondrement mondial et construire les bases
de la relance et du développement durable est un défi lancé
aux dirigeants des principales démocraties du monde industrialisé
et développé. La mondialisation est le fait des hommes et
non une force de la nature même si, à l'heure actuelle, elle
semble souvent échapper à tout contrôle. La véritable
question qui se pose à la communauté internationale est de
savoir s'il existe une volonté politique pour créer des stratégies
internationales et des institutions aptes à gérer le processus
de mondialisation afin de répondre aux besoins et aux aspirations
de la population.
La présente déclaration a été préparée
par la Commission syndicale consultative auprès de l'OCDE (CSC)
en coopération avec nos partenaires et notamment la Confédération
internationale des syndicats libres (CISL), la Confédération
mondiale du travail (CMT) et la Confédération européenne
des syndicats (CES).